La veille déjà, un parfum de BRM règne sur cette balade. En effet, je prépare un petit sac à dos avec beaucoup de nourriture, et je vais partir de nuit pour un long périple. Deux choses que je n'ai plus faites depuis le BRM 300 montagneux du 14 juin.

Cette sortie a été planifiée ces dernières semaines, par des échanges de mails avec Alex, cyclo-blogueur et chasseur de cols qui envisage de venir enrichir sa collection autour de Grenoble. Parmi les parcours qu'il planifie, je lui propose de l'accompagner sur l'un des plus longs, sur un terrain que je fréquente beaucoup moins que Belledonne et Chartreuse qui me sont géographiquement proches: le Vercors et le Trièves.
Le rendez-vous est donné vers 6h30 à Vizille, pour un départ de jour. Ne souhaitant pas prendre la voiture pour si peu, j'enfourche le vélo une heure avant et pour 25 km. Les premières lueurs du jour sont visibles à l'Est, et se reflètent dans l'Isère que je traverse à Domène. Je suis extrêmement prudent: mon dernier départ de nuit, c'était le 23 juillet pour une grimpée ultra-matinale avant le boulot, et j'avais bêtement chuté, au tout début de la sortie, sur une ligne blanche que je prenais pour la délimitation d'une bande cyclable, mais qui matérialisait aussi à cet endroit un petit trottoir... Cela ne m'avait pas empêché d'effectuer la sortie prévue, mais depuis j'essaye de faire davantage attention à ces obstacles urbains, de jour comme de nuit.
Comme prévu, il fait presque jour dans la descente d'Uriage à Vizille, et complètement jour lorsque je retrouve Alex. Les premiers tours de pédale sont l'occasion de faire connaissance. On s'était mis d'accord sur le fait de rouler cool, de ce fait je ne me fais pas de soucis sur nos rythmes respectifs, ni sur ma capacité à terminer cette longue boucle pas trop fatigué, compte tenu de mon faible entraînement récent sur ce type de distance et de la perspective d'une grimpée chronométrée dans sept jours. Car notre parcours devrait comptabiliser environ 200 km pour 4000 mètres de dénivelé positif.
Mes sorties récentes étaient composées de grimpées à bloc d'une part, et de sorties d'endurance d'autre part, beaucoup moins intenses mais de moins de 6 heures. La perspective d'une sortie d'une douzaine d'heures déclenche des sensations qui s'étaient quelque peu enfouies et qui, en remontant à la surface, sont sources de bonheur et d'excitation. La redécouverte (permanente !) du cyclotourisme, en quelque sorte. Plus que jamais, la grande variété de mes efforts à vélo contribue largement au plaisir que je prends à pratiquer ce sport.
Notre parcours consiste à grimper dans le Vercors en commençant par le col de l'Arzelier, puis à longer la barrière du Vercors Est par les classiques cols des Deux et de l'Allimas. Notre progression vers le Sud se poursuivra par le franchissement du col de Menée, puis nous rejoindrons la route Sisteron-Grenoble par le col de Grimone. Nous basculerons ensuite en Trièves où nous transiterons par Mens puis le pont de Brion, pour enfin atteindre le col du Fau avant la descente finale.
Les cols au programme sont, dans l'ordre:
- le col de l'Arzelier,
- le col des Deux,
- le col de la Croix de Serre Monet, que nous irons chercher au-dessus de Gresse-en-Vercors et qui sera nouveau pour moi,
- le col de l'Allimas,
- le col du Prayet, qui se franchit en montée, sur la route du col de Menée,
- le col de Menée,
- le col de Grimone,
- le col de la Croix Haute,
- le col du Banchet, nouveau pour moi,
- le col du Thaud,
- le col du Cornillon, aussi appelé col de l'Homme du Lac,
- et le col du Fau.
Après s'être un peu réchauffés dans la vallée, nous attaquons la montée la plus longue du jour, à savoir le col de l'Arzelier. Les premiers kilomètres de montée me rappellent le BRM 200 montagneux, mais aujourd'hui, à Saint-Barthélémy nous bifurquons à droite en direction du col.
Nos rythmes s'accordent parfaitement. Les conditions sont agréables, il fait frais, la circulation est quasi inexistante. C'est ma première ascension de ce col par ce versant; je la croyais plus difficile.




La descente vers Château-Bernard est courte, et la suite consiste en une succession de petites bosses avant d'attaquer l'ascension du col des Deux. Celui-ci est également nouveau pour moi dans ce sens. Il n'est pas long, mais il doit bien y avoir du 15% de pente par endroits.
L'arrivée au col des Deux:

Le petit col de la Croix de Serre Monet se situe entre le col des Deux et Gresse-en-Vercors. Nous effectuons une première tentative dans la descente du col des Deux, en tournant à droite sur un petit pont. Nous grimpons quelques centaines de mètres pour arriver à un cul-de-sac, où du moins la route goudronnée laisse place à un chemin. Le col n'est plus très loin, mais nous préférons tenter une deuxième chance par l'autre côté.
De l'autre côté, c'est plus long, mais goudronné jusqu'au bout. Il suffit de monter jusqu'au bout du parking qui se trouve au sommet de la station. Bizarrement, le début de la descente est goudronné. Il ne doit donc pas y avoir beaucoup de poussage à effectuer pour le grimper de l'autre côté.
Au niveau du col de la Croix de Serre Monet: descente goudronnée, mais jusqu'où ?

Notre route des balcons s'achève par le col de l'Allimas, une simple formalité depuis Gresse. Les gravillons signalés par Brigitte au début du mois ont presque tous disparu.
Le Mont Aiguille, depuis le col de l'Allimas:

La descente du col de l'Allimas comporte un piège dont je me souvenais: une petite remontée au niveau de la Bâtie.
Après Saint-Michel-les-Portes, nous rejoignons... l'autoroute du col de la Croix-Haute. Une circulation ininterrompue dans les deux sens, qui marque les retours de vacances, week-end du 15 août oblige. Nous allons affronter ce flot pendant quelques kilomètres. Certains véhicules dépassent très prudemment, il faut supporter de se faire frôler par d'autres.
A hauteur de Clelles, nous prenons à droite la direction du col de Menée dans un environnement plus calme.
Le Mont Aiguille, sous un autre angle:


Les 500 premiers mètres de dénivelé, qui aboutissent au col du Prayet, me paraissent long. Nous doublons un joyeux petit groupe de quatre cyclistes, lorsque une fusée immatriculée "Team Chamrousse" nous dépasse. On la reverra plus tard.
Les 200 derniers mètres de dénivelé sont beaucoup plus roulants. J'en profite pour m'alimenter.
Vers la fin de la montée du col de Menée:

En regardant derrière moi:

Le col:

Dans la descente, nous nous arrêtons aux Nonières pour faire le plein d'eau et manger, exactement à l'endroit où nous nous étions arrêtés avec Yann il y a deux ans, dans l'autre sens. Yann était engagé sur le Mille du Sud et j'avais décidé de l'accompagner sur les mille mètres de dénivelé du col de Menée, à grimper ce jour-là contre le vent: une épreuve à ce stade de la randonnée. Je me souviens très bien de Yann, assis à côté de la fontaine, essayant de manger ses tranches de jambon. Que cette montée fut difficile ! Un jour et demi plus tard, il terminait la randonnée avec succès.
A hauteur de Mensac, nous tournons à gauche pour gravir le col de Grimone. Alex me dit que ce col est facile, oui mais il est long et il va faire chaud. Je ne suis passé qu'une seule fois dans ce sens, c'était il y a quatre ans et pour une boucle bien plus courte.
Tout commence par la remontée des gorges du Rio sourd. C'est splendide, et très encaissé au point que par deux fois le GPS me positionne à plusieurs centaines de mètres de la route. Je perds Alex, qui a dû procéder à des arrêts photo. Je veux monter à mon rythme, régulièrement, à l'économie.
Dans les gorges du Rio sourd:




Tout là-haut, le col de Grimone:

A partir de Glandage, la route s'élève un peu plus sérieusement. La fusée du Team Chamrousse, qui nous avait déjà dépassés dans le col de Menée et qui a dû s'arrêter manger à Châtillon-en-Diois, me double en m'encourageant. Le temps d'enlever quelques dents, je me retrouve dans sa roue. Cela va durer cinq cent mètres. Le rythme n'est pas excessif, mais il fait trop chaud et j'ai déjà trop de kilomètres dans les jambes. Côte à côte dans une épingle, je lorgne sur son compteur et je crois y lire une fréquence cardiaque de 135. OK, on ne joue pas dans la même cour. La réputation du Team Chamrousse n'est plus à faire.
Plus haut, quelques lacets avant le col me donnent une vue sur les kilomètres déjà gravis. Je m'inquiète en n'y voyant pas Alex. Finalement, arrivé au col, je fais demi-tour et retrouve Alex un peu plus bas. Comme moi, il a trouvé cette montée bien longue et commence à fatiguer. Pour le Trièves, on avisera au col de la Croix-Haute. Je lui explique que dans notre sens, ce sera une formalité d'un ou deux kilomètres.
La fin du col de Grimone (en regardant derrière moi):

Il n'y a pas de place pour tout le monde !

Depuis la descente du col de Grimone. Superbe !

En réalité, après une courte descente, le col est indiqué à 3 km. C'est de nouveau l'autoroute, la même que nous avions quittée tout à l'heure. Cela redonne des jambes à Alex et je le laisse filer devant. Au sommet, il m'annonce que c'est OK pour le Trièves. Youpi !
Nous quittons l'autoroute à la première sortie. Les bidons sont remplis à la fontaine de Lalley et c'est parti pour une succession de petites bosses.
Bienvenue dans le Trièves:



Le col du Banchet est un peu plus costaud qu'une simple bosse, et il fait chaud. Nous arrivons finalement à Mens, véritable carrefour du Trièves. Aujourd'hui nous allons quitter le Trièves tout comme nous y étions entrés lors du BRM 200: par le pont de Brion et le col du Fau. Les petits cols du Thaud et de Cornillon sont une formalité, avant de redescendre sur le pont de Brion.
Peu après Mens, ce paysage toujours surprenant:

Le pont de Brion enjambe l'Ebron, qui se jette un peu plus loin dans la retenue du Monteynard.

Je ne néglige pas la remontée vers le col du Fau. Il y a 350 mètres de dénivelé, et pour y être passé une seule fois dans ce sens, je sais qu'il ne faut pas s'impatienter. Après une première partie pentue, la suite est plus facile mais traîne en longueur. J'accélère un peu mais pas trop, je constate que les jambes sont encore là et que la chaleur est supportable.
Arrivé au col du Fau, les voitures en provenance du Sud forment un bouchon. Heureusement, l'essentiel de ce bouchon se déverse sur l'autoroute et non sur la départementale que nous allons emprunter.
Monestier-de-Clermont, en-dessous du col du Fau: retour à la maison.

La descente s'effectue en ordre dispersé: Alex me dépassant à un instant à grande vitesse, je ne peux prendre sa roue et ne souhaite pas gaspiller mes forces aujourd'hui.
A Vizille, nous croisons de nouveau un long bouchon. Alex dit se croire de retour en région parisienne. Ah, qu'est-ce qu'on était bien aujourd'hui sur notre vélo, journée bien moins fatigante que dans une voiture climatisée au milieu des bouchons.
De retour chez moi, le compteur dépasse les 250 km, et le dénivelé excède 4400 mètres. J'ai envie de dormir mais le reste va bien. Je me suis donc bien hydraté et alimenté, et les jambes n'ont pas forcé. Les recettes des longues distances ne s'oublient pas si vite... et les sensations qu'elles procurent non plus. Cette journée était un pur bonheur. Merci Alex pour ton agréable compagnie, et pour m'avoir motivé pour un parcours de cette longueur.
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